La publication ce week-end des conditions financières de départ de Michel Combes de la direction générale d’Alcatel-Lucent a fait naître une nouvelle polémique sur la rémunération des dirigeants de société.
Cette polémique est néfaste pour les entreprises, mais aussi pour la France toute entière, en créant une nouvelle occasion de crispation dans les relations dirigeants / salariés au moment même où toutes les forces du pays doivent être rassemblées pour retrouver enfin le chemin de la croissance et vaincre le chômage. Elle donne des arguments inutiles à tous les partisans de l’archaïque lutte des classes et du conflit chefs d’entreprise / salariés.
Au-delà des montants en cause, c’est le fait que les règles aient été modifiées (durée de détention et nombre d’actions attribué en particulier) pour permettre au directeur général d’Alcatel-Lucent de bénéficier de conditions améliorées par rapport à ce qui était initialement prévu, qui a choqué.
L’argument de la multiplication de la valeur de l’action « par quatre à cinq » pendant les deux ans de son mandat ne peut suffire, alors que les marchés financiers ont fortement augmenté pendant la même période et, surtout, que cette réussite n’est pas le fait d’un seul homme, mais celle de toute une équipe et plus largement de la collectivité des salariés.
L’argument de la prise de risque et de la précarité ne tient pas plus, alors que le directeur général d’Alcatel-Lucent quitte ses fonctions pour rejoindre immédiatement un même poste au sein d’un autre groupe.
Quelle que soit la fierté de Michel Combes pour son action à la tête d’Alcatel-Lucent, il n’est enfin pas possible de faire l’impasse sur les suppressions d’emploi qui ont été mises en œuvre pour assurer le redressement de l’entreprise et sur le fait qu’il n’a pu empêcher la perte du contrôle du groupe au profit de son concurrent finlandais. La réussite est donc loin d’être totale.
Il est essentiel qu’en France aussi, le succès puisse être récompensé et qu’un dirigeant d’entreprise qui a réussi reçoive la juste rémunération de son talent et de ses efforts. Cela ne sera durablement possible que si les chefs d’entreprises et les administrateurs se montrent exemplaires.
Il appartient aux conseils d’administration d’appliquer avec rigueur les règles qu’ils ont eux-mêmes fixées et de ne prêter le flanc à aucun soupçon de complaisance, de consanguinité ou de copinage.
Et il revient aux dirigeants, à l’heure où ils prônent collectivement la modération salariale pour restaurer la compétitivité des entreprises françaises sur la scène internationale d’appliquer la même modération à leurs propres rémunérations, y compris leurs conditions de départ.
L’AFEP et le Medef ont eu raison de saisir dès aujourd’hui le Haut Comité de gouvernement d’entreprise. Mais il serait encore meilleur que les « patrons » adoptent le comportement responsable rendant inutile son intervention.
C’est en se montrant cohérents et exemplaires que les dirigeants d’entreprises se montreront à la hauteur de leurs responsabilités et qu’ils gagneront la légitimité nécessaire pour entraîner l’ensemble des salariés qui leur sont confiés vers le succès commun.
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