Chers Amis,
Les trois prochaines semaines s’annoncent difficiles. Les professionnels médicaux me disent que nous tiendrons. Dans ce contexte, la priorité est d’accélérer la vaccination. Mais nous devons aussi préparer l’avenir, en particulier proche. La lenteur de notre campagne a pour première cause notre dépendance à l’égard des vaccins étrangers. L’Europe est, avec l’Afrique, la seule grande région qui n’a pas son vaccin ! Pour la France et pour l’Union, il y a urgence à retrouver la souveraineté vaccinale.
Une fois encore, l’exécutif français est en retard d’une bataille. Pendant que les autres pays s’emploient à vacciner, le pouvoir français continue à se perdre dans des débats sémantiques sur le reconfinement et son contenu… Emmanuel Macron et ses fidèles avaient théorisé, au début de son quinquennat, la distinction entre les deux corps du président, son corps physique d’une part, son corps politique d’autre part. Quatre ans plus tard, il faut faire le constat d’une séparation totale entre la voix, forte, de l’exécutif et la réalité, faible, de ses actes.
Il faut être clair. Au delà de la propagande gouvernementale, le retard français en matière de vaccination reste immense. Au sein de l’Union, nous pointons à la 23ème place, derrière même l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne, qui nous sont comparables en taille. Le nombre de doses administrées pour 100 habitants s’échelonne entre 32 à Malte et 5 en Bulgarie ou en Lettonie, avec une médiane de 13. La France n’en a injecté que 11,6, contre 12,5 en Allemagne, 12,8 en Espagne et en Italie, 36,3 aux États-Unis, 42,7 au Royaume-Uni et 111,9 en Israël…
C’est pour cela que le chef de l’Etat a tort de reporter la charge du retard sur l’Union. Avec Emmanuel Macron, l’échec est forcément collectif et le succès toujours personnel. C’est jouer contre l’Europe. Si celle-ci a failli, la faute en incombe d’abord à ses dirigeants, à savoir la collectivité des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union. Et la lenteur française a pour première cause l’inefficacité des pouvoirs publics nationaux, comme le montre notre retard par rapport aux meilleurs élèves de l’Union.
Jacques Attali, pourtant proche du pouvoir, a raison d’enrager contre la naïveté des dirigeants européens qui n’ont pas exigé des laboratoires médicaux une priorité de livraison, qui ont préféré négocier le prix des vaccins plutôt que leur disponibilité et qui ont privilégié la protection de leur propre responsabilité sur la conclusion rapide des contrats d’approvisionnement. Il est aussi fondé à enrager contre les mensonges de nos dirigeants qui promettent une immunité vaccinale le 14 juillet ou le 21 septembre et qui prétendent avoir parfaitement gérer l’affaire.
Car ce sont les Français et les Européens qui auront à payer les erreurs de leurs gouvernants. Conséquences pour leur santé et leur risque de mortalité d’abord. Impact financier ensuite puisque le coût du retard actuel est estimé à 123 milliards d’euros pour l’ensemble de l’Union par Euler Hermes, chaque semaine supplémentaire de retard représentant un montant additionnel de 3 milliards pour notre seul pays. Coûts budgétaires aussi, puisque le déficit public devrait atteindre un nouveau sommet en 2021 après le record de 9,2% en 2020. Séquelles psychologiques, sociales et scolaires également comme le montre l’expérience des 12 derniers mois. Recul pour nos libertés fondamentales enfin. Le ministre des Relations avec le Parlement expliquait jeudi que l’état d’urgence sanitaire pourrait être maintenu jusqu’à l’immunité collective… Au rythme actuel, ce sont des années de privation de liberté que les Français auront à subir !
C’est pour cela qu’il y a urgence à changer de rythme et à récupérer notre souveraineté vaccinale. Nous ne serions pas dans une telle situation si nous avions su ne pas baisser la garde et ne pas tomber sous la dépendance des autres puissances en matière de recherche médicale et de vaccin. La France doit sans plus attendre exercer son droit de licence obligatoire. Il nous autorise à imposer à Pfizer-BioNTech, Moderna, Astra-Zeneca ou Johnson & Johnson le transfert de leur technologie à Sanofi et à nos autres producteurs nationaux. Cela nous permettrait de rattraper notre retard et de préparer la nouvelle génération des vaccins répondant aux défis des futurs variants afin de traverser au mieux les prochaines années.
Trois mois ont déjà été gaspillés. Il est temps de ne plus en perdre. Comme vient de l’affirmer Patrice Caine, patron de Thales, dans Les Échos, l’Europe n’est pas vouée au décrochage technologique. Encore faut-il prendre les moyens de notre indépendance, de notre futur et de notre liberté.
C’est toujours pour préparer l’avenir que nous devons maintenir les écoles, collèges, lycées et universités ouvertes, coûte que coûte. Le rapport de la Cour des comptes publié la semaine dernière a dénoncé la faible efficacité de l’école à distance. Tous les parents d’élève peuvent confirmer qu’elle constitue un enseignement en mode très dégradé et, dans de nombreux cas, un naufrage.
Dans une même perspective, nous devons maintenir les prochaines échéances électorales, qu’il s’agisse des législatives partielles ou des prochaines régionales. Ce n’est pas parce que les derniers sondages ne créditent plus le parti présidentiel et ses alliés du Modem que de 16% des suffrages pour ces dernières que le pouvoir doit les reporter ! Tous les autres pays, des Etats-Unis au Portugal, en passant par l’Allemagne, l’Espagne, les Pays-Bas ou bien d’autres, ont été capables de respecter leur calendrier démocratique malgré la pandémie. Au regard de notre histoire, ainsi que du sacrifice de tous ceux qui ont sacrifié leur vie pour nos libertés, il serait scandaleux de faire moins bien.
Le général de Gaulle l’avait théorisé. On peut perdre une bataille sans perdre la guerre. La réussite de la vaccination aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni confirme que l’échec n’est pas inéluctable. Une mauvaise situation peut être rapidement retournée à condition d’en prendre les moyens. L’échec des pouvoirs publics depuis treize mois face à la crise sanitaire ne signifie pas que notre nation soit définitivement condamnée. Au contraire, nous pouvons remettre la France sur la voie du succès et du progrès en changeant de méthode, d’objectifs et de dirigeants. C’est l’objectif du projet auquel nous travaillons avec nos alliés et que nous vous détaillerons bientôt. Ensemble, offrons à notre pays l’avenir que nous voulons.
Bon week-end à tous
Amicalement
François Vigne
Président de la France en marche