Stop au populisme et au complotisme d’Etat !
Emmanuel Macron a annoncé jeudi dernier la suppression de l’ENA, en fait son futur remplacement par l’Institut du Service Public. La réforme de l’ENA est nécessaire. Elle aurait dû intervenir depuis longtemps. Mais l’annonce présidentielle ne répond pas aux enjeux de transformation de la haute administration de l’Etat. Elle relève d’un coup de communication démagogique visant à accréditer le statut de réformateur du président de la République à un an du scrutin présidentiel.
L’ENA a besoin, comme l’ensemble de notre système administratif, d’une profonde réforme. Le naufrage de l’Etat depuis le début de la crise sanitaire le confirme. L’administration s’est révélée incapable d’exécuter les annonces effectuées et d’atteindre les résultats auxquels les Français ont droit au regard des sommes qu’ils consacrent aux dépenses publiques et de l’ensemble des prélèvements obligatoires qui leur sont imposés. Il est urgent de réformer l’organisation de l’administration et ses processus de décision. Il faut aussi adapter la formation de l’ensemble de nos responsables administratifs pour leur permettre d’agir efficacement au service de la France. Il est enfin impératif de prendre les moyens les carrières publiques de nouveau attrayantes, alors que les meilleurs se détournent de l’administration de l’Etat.
La réforme de l’ENA ne peut donc pas s’improviser. Elle doit résulter d’une analyse approfondie de l’Etat dont la France a besoin pour répondre aux défis du XXIème siècle et des moyens à mettre en œuvre pour assurer la formation de ses plus hauts serviteurs. Les annonces du chef de l’Etat jeudi dernier ne répondent pas à cette exigence. Décidées solitairement, sans réelle concertation, elles ne permettront pas de réformer en profondeur la formation de notre élite administrative et sa préparation aux enjeux de notre temps. Elles alimentent le populisme en faisant des énarques les responsables de la faillite actuelle, alors que c’est le mode de gouvernement de l’exécutif qui en est la première cause.
Le pouvoir est tout aussi coupable quand il trahit la vérité et développe des mensonges d’Etat pour servir ses intérêts politiques. Ce fut le cas pour les masques, à la fois quand le gouvernement en a décrété l’inefficacité, puis les a imposés à l’extérieur. Ce fut le cas aussi pour la manipulation régulière des statistiques sanitaires pour imposer des mesures que les faits ne justifiaient pas. La désignation des Républicains comme responsables de l’avortement du débat sur l’euthanasie en constitue un autre exemple. Le chef de l’Etat ne souhaitait pas, à juste raison, que ce sujet revienne sur la table dans le contexte actuel et avant le prochain scrutin présidentiel. En rendre ses opposants responsables relève des mêmes techniques complotistes que celles qu’il condamne régulièrement.
La faute est d’autant plus grave qu’elle continue à affaiblir la crédibilité de la parole publique. Emmanuel Macron ne peut pas se permettre de jouer avec ce qui reste de confiance publique, alors que 63% des Français la lui refusent.
C’est la responsabilité du président de la République, de son gouvernement et de tous les responsables politiques de refuser la facilité de la démagogie, du populisme et du complotisme pour faire le choix de l’intelligence des Français. Comme l’affirmait le général de Gaulle dans son discours de Bayeux, les pouvoirs publics ne valent, en droit et en fait, que s’ils s’accordent avec les intérêts supérieurs deux pays, s’ils reposent sur l’adhésion confiante des citoyens. Bâtir sur autre chose, ce serait bâtir sur du sable.
L’heure est venue de construire sur du roc ! Il en va de l’avenir de notre démocratie et de notre République !