Loin d’être nécessaire, le prélèvement à la source est inutile. Il est aussi néfaste.

Le lancement de cette réforme fut une décision de circonstance de François Hollande. Voulant à tout prix honorer son engagement de campagne n°14 de fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, mais reculant devant les conséquences qu’aurait entraînées une telle réforme ou la remise à plat annoncée par son Premier ministre Jean-Marc Ayrault, il ressortit des placards le serpent de mer du prélèvement à la source, étudié par des générations d’étudiants de Sciences-Po et de l’ENA, mais toujours refusé, car ni adapté, ni convaincant.

Le prélèvement à la source est de fait inutile.

L’impôt sur le revenu actuel bénéficie d’un excellent taux de recouvrement, supérieur à 98%. Il n’est pas prévu que l’imposition à la source l’améliore. Les bugs actuels confirment qu’il devrait au contraire la dégrader au départ. Si la lutte contre la fraude fiscale doit se poursuivre, c’est en dehors du prélèvement à la source, qui ne lui sera d’aucun secours.

La réforme du prélèvement à la source, si elle intervient, ne permettra pas  de réaliser des économies substantielles dans l’administration fiscale, qui conservera ses fonctions de contrôle. C’est pour cela que l’exécutif s’est gardé de communiquer sur l’intérêt financier de la mesure. Cette dernière aura en revanche un coût certain pour les entreprises, transformées en percepteur…

S’agissant enfin des bénéfices supposés pour la gestion de trésorerie des Français, ils sont inexistants. C’est faire injure aux Français que de prétendre qu’ils ne savent pas gérer leur budget. L’immense majorité de ceux qui sont assujettis à l’impôt sur le revenu n’ont jamais eu de découvert du fait du paiement de l’impôt. Et si le but principal de la réforme est de rapprocher la date de règlement de l’impôt de celle du versement du salaire, il suffirait de prévoir que le prélèvement mensuel intervienne le premier ou le second de chaque mois.

Les Français n’ont pas un problème de trésorerie, mais un problème de pouvoir d’achat, handicapé par une dépense publique qui capture 56% de la richesse nationale chaque année et que le gouvernement ne prend pas les moyens de faire baisser.

Loin d’être seulement inutile, le prélèvement à la source, en aussi néfaste.

Le prélèvement à la source, comme tout prélèvement à la source, a l’inconvénient de rendre l’imposition moins visible, plus indolore. Il permettra ainsi de faire accepter de nouvelles hausses de fiscalité sans véritable contrôle…

L’impôt à la source remet en cause les principes fondateurs de la fiscalité française, qui corespondent aussi à des choix fondamentaux. En particulier, le prélèvement à la source va à l’encontre du concept français du foyer fiscal pour privilégier celle du contribuable, seul face à l’administration fiscale. Les publicités réalisées par le gouvernement sont à la matière éclairantes, incitant chaque membre du foyer à opter pour une fiscalisation individuelle. Ce devrait d’ailleurs être le choix de la majorité des contribuables, dès lors qu’il existe des différences de rémunération au sein de leur couple.

Cette conséquence n’est pas qu’un dommage collatéral du prélèvement à la source. Il correspond à une vision de la société et de l’Homme, ainsi qu’à la volonté des partisans du prélèvement à la source de promouvoir une France peuplés d’individus, et non plus de familles, face à l’administration fiscale. Cette conception, très socialiste et socialisante n’est pas la nôtre !

Le prélèvement à la source impose enfin une charge supplémentaire aux entreprises, sans aucun bénéfice. Le gouvernement aurait logiquement dû, si le but de la la réforme était réellement de simplifier le recouvrement de l’impôt, annoncer les économies administratives correspondantes et les restituer aux entreprises, sous forme de réduction d’impôts ou de charges, pour compenser les coûts du prélèvement à la source pour les entreprises. À défaut, il s’agit bien d’un nouveau prélèvement en nature, sans compensation, sur celles-ci…

Pour toutes ces raisons, il est urgent de stopper le projet d’imposition à la source. L’argument selon lequel l’administration et certaines entreprises auraient déjà beaucoup dépensé n’est pas pertinent. Si la mesure est  foncièrement mauvaise, il faut la rejeter, tout en poursuivant la responsabilité politique des dirigeants des quinze dernières années.

La décision est entre les mains du président. Il lui revient de prendre très rapidement la décision de stopper la mise en place du revenu à la source, sans plus tergiverser, tant ses hésitations actuelles sont perturbantes pour la consommation des ménages et leurs décisions d’investissement. Pour Emmanuel Macron, l’heure est venue d’agir !

lfm_2016