Michel Sapin a annoncé mercredi les grandes lignes du projet de prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Le pouvoir, outre qu’il préfère, sur ce sujet encore, transférer la charge de la mise en oeuvre à ses successeurs, a également laissé dans l’ombre des points essentiels du changement annoncé.

Le prélèvement à la source ne simplifiera en rien les obligations fiscales des contribuables. Qu’il s’agisse de la déclaration de revenus, des modalités de régularisation ou de la possibilité d’opter pour un taux « neutre » afin de préserver la confidentialité des données fiscales vis-à-vis de l’employeur, le prélèvement à la source n’apportera aucun véritable progrès pour le contribuable par rapport à la mensualisation actuelle.

De fait, l’objectif gouvernemental n’est pas là. Derrière l’intention officielle de réforme, il s’agit d’abord de préparer la fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG, promise par François Hollande avant les élections de 2012, afin de substituer au financement proportionnel actuel de la Sécurité sociale un financement progressif selon les revenus, au détriment des 45 % de ménages français sur lesquels se concentre le prélèvement de l’impôt.

Il s’agit ensuite de rendre le paiement de l’impôt plus « indolore », en évitant son paiement direct, pour pouvoir mieux l’augmenter ensuite, à rebours de ce que l’intérêt économique de la France et de ce que la motivation de ses acteurs économiques commandent.

Il s’agit enfin de ruiner un peu plus la politique familiale française, en individualisant le calcul de l’impôt sur le revenu au lieu de sa détermination actuelle sur une base familiale, contre l’intérêt des familles nombreuses.

Pour les employeurs et tous ceux qui deviendront, à leur insue, collecteurs d’impôts, le prélèvement à la source constituera une nouvelle charge, non indemnisée. Le ministre des Finances s’est moqué du monde en assurant qu’ils pourront bénéficier du placement de la trésorerie correspondante pendant quelques jours ou quelques semaines selon les cas. A l’heure où la politique monétaire accomodante des banques centrales s’accompagne de taux d’intérêts proches de zéro ou négatifs, il est clair que les employeurs ne trouveront là aucune compensation aux nouvelles charges qui leur seront imposées.

La logique serait pourtant de réduire les dépenses publiques à due concurrence des économies que fera réaliser, pour l’Etat, le transfert de la collecte de l’impôt sur le revenu aux employeurs et de les faire bénéficier d’une baisse équivalente de leurs propres impôts. Cela supposerait de réaliser les réformes nécessaires, y compris en termes de personnel, au sein de l’administration fiscale, ce que Michel Sapin s’est bien gardé d’annoncer !

En accélérant le passage au prélèvement à la source, le gouvernement tente de se donner une fausse image de réformateur tout en mettant en place les outils nécessaires d’une politique partisane de fiscalisation accrue de l’économie nationale dont nous avons vu les effets désastreux depuis 2012. C’est le contraire de ce qu’il faut faire !

La vraie réforme fiscale dont notre pays a besoin, ce n’est pas d’un changement du mode de prélèvement de l’impôt, mais d’une baisse des prélèvements obligatoires grâce à la transformation résolue de l’organisation politique et administrative de la France, ainsi qu’à la refocalisation de l’action publique sur ses missions essentielles. C’est celle que nous voulons et allons mener dans l’intérêt de la France et de tous les Français !

lfm_2016