Les frappes réalisées hier en Syrie par la France et le Royaume-Uni aux côtés des Etats-Unis viennent encore une fois de le démontrer : l’Europe de la défense est un mythe sans consistance.
Il est clair que nos deux pays sont les deux seuls, en Europe continentale, à disposer d’armées capables d’intervenir décisivement au-delà des frontières de l’Union. Surtout, il n’y a pas, chez tous les autres membres de l’Union, le consensus et la tradition permettant de décider et d’agir rapidement et efficacement.
Soixante-treize ans après la fin de la Seconde guerre mondiale, l’Allemagne, l’Italie et les autres pays d’Europe qui avaient soutenu la puissance nazie restent profondément opposés à toute intervention qui ne vise pas à défendre leurs frontières et ne s’inscrive pas dans le strict cadre de l’ONU. C’est ce qui explique l’opposition de 78% des Allemands à toute frappe syrienne et la décision d’Angela Merkel de refuser la participation, même symbôlique, de ses forces armées.
De même, les anciens pays du bloc de l’Est restent traumatisés par les trop longues années passées sous le joug soviétique et fortement hostiles à toute intervention en dehors de leurs frontières, hors participation occasionnelle aux contingents de l’ONU ou de l’Union européenne.
Nous devons en tirer l’ensemble des conséquences et en finir avec le sempiternel discours sur l’Europe de la défense. Celle-ci n’est pas à l’ordre du jour. La paralysie la dominerait si elle existait. Nous devons tous nous souvenir que la seule intervention pour laquelle un consensus favorable s’était dessiné, sous forte pression américaine, était celle qu’il ne fallait pas mener, la guerre d’Irak de 2003, à laquelle la France a justement refusé de s’associer.
La conclusion est claire : c’est sur nous seuls que nous devons compter pour assurer notre défense et mener les actions que nous voulons au service de l’action diplomatique de la France. Cela suppose aussi de nous donner les moyens de notre souveraineté en allouant à nos armées les budgets nécessaires.
Cela n’empêche pas, bien au contraire, de développer les coopérations, notamment de matériels, possibles, en s’assurant à chaque fois qu’elles sont compatibles avec une action souveraine et indépendante.
L’Europe de la défense ne doit pas être un point de départ, ni même un point d’étape. Elle ne pourrait qu’être la consécration d’une Europe souveraine. Nous en sommes loin et c’est notre responsabilité commune de prendre les moyens de notre défense au service de la liberté et de la grandeur de la France.