Après l’appel d’Emmanuel Macron mardi dernier au président du Sénat et la mise en garde adressée vendredi par Christophe Castaner à la commission d’enquête de la Haute assemblée, la tribune de la garde des Sceaux dans le monde d’hier constitue une nouvelle tentative de l’exécutif pour peser sur l’enquête en cours concernant l’affaire Benalla.

Ces trois interventions, témoignent de la panique qui s’est emparée de l’équipe présidentielle. Aux abois, elle semble prête à tout pour empêcher la manifestation de la vérité sur une affaire, certes d’ampleur limitée, mais qui illustre les profonds dysfonctionnements du système actuel. Car, ce qui est en cause, c’est la création d’équipes parallèles, fonctionnant en dehors du cadre des institutions et de l’administration de l’Etat, et l’octroi par le président aux agents qui les composent de privilèges et de moyens indus.

Contrairement aux affirmations de Nicole Belloubet, la commission d’enquête du Sénat n’empiète pas plus sur le domaine judiciaire qu’elle ne porte atteinte à la séparation des pouvoirs. Conformément à sa mission, c’est son rôle d’éclairer le Sénat et les Français sur les conditions dans lesquelles Alexandre Benalla a pu, sans appartenir aux forces de sécurité intérieure, être associé à l’exercice de leurs missions de maintien de l’ordre et de protection de hautes personnalités, ainsi que le type de sanctions qui pourraient lui être applicables.

La séparation des pouvoirs est un fondement essentiel de notre République et une garantie fondamentale pour l’exercice des libertés publiques. La Constitution de la Vème République l’a établie en principe fondateur de l’organisation des pouvoirs publics et a particulièrement veillé à prévenir le gouvernement des juges.

Mais la séparation des pouvoirs n’a pas été instituée pour assurer l’irresponsabilité et l’impunité des dirigeants de l’exécutif. La Constitution de 1958 a d’ailleurs prévu, en son article 68, le garde-fou nécessaire en confiant au Parlement, représentant le peuple souverain, la responsabilité de destituer le Président de la République en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat.

Nous n’en sommes pas là, malgré l’angoisse manifeste de Christophe Castaner vendredi dernier. Mais il revient à nos gouvernants, à commencer par le président de la République et tous les membres du gouvernement, de respecter les droits du Parlement, en le laissant procéder à ses missions de contrôle dans le respect de la Constitution. Il en va de l’intérêt de la France et de l’avenir de notre démocratie.

lfm_2016