L’enjeu est là-aujourd’hui, non par habitude ou par idéologie, mais parce que la France aurait beaucoup à perdre à sa décomposition.
Il y a urgence à agir car les dirigeants actuels de l’Europe, chefs d’Etat ou de gouvernement comme membres de la Commission, n’apparaissent pas à la hauteur de la situation. Au lieu de la guider vers l’avenir, ils précipitent sa décomposition faute de vision, de volonté et d’action.
Le sommet européen de Bratislava du vendredi 16 septembre, convoqué après le vote britannique en faveur du Brexit, avait pour ambition la « relance » de l’Europe. Mais les chefs d’Etats et de gouvernements des 27 pays se sont révélés incapables d’apporter des réponses aux enjeux du Brexit. Et le discours sur l’état de l’Union du président de la Commission le mercredi 14 septembre a témoigné du même épuisement du l’autre organe de l’exécutif européen.
S’ils s’accordent à constater n’avoir jamais vu autant de divergences et de priorités opposées entre-eux, les dirigeants actuels de l’Union semblent incapables d’imaginer de solutions pour la sortir de l’impasse. Ce devrait pourtant l’une de leurs priorités. Leur immobilisme renforce les frustrations et l’exaspération des peuples européens face aux imperfections de l’Union, comme le montrent le vote britannique pour le Brexit ou les dernières élections régionales en Allemagne.
Il n’y a pas de fatalité à cette dérive destructrice. Mais des actes forts sont nécessaires pour y mettre un terme.
Il faut d’abord clarifier, pour tous les Européens, où va l’Union et ses compétences actuelles pour dissiper les craintes infondées. Les peuples d’Europe ne doivent plus avoir le sentiment que l’Union est une construction bureaucratique hors de contrôle, mais qu’elle a des objectifs clairs et limités, sous le contrôle des chefs d’Etat et de gouvernement de leurs États, qui conservent leur souveraineté.
Dans cette perspective, il est aussi essentiel de moins promettre et de plus délivrer. Il faut arrêter par exemple de parler d’une Europe de la défense, qui ne pourrait véritablement exister qu’après transfert de la souveraineté militaire des États vers l’Union, pour se contenter d’une Europe des coopérations militaires, seule construction possible aujourd’hui. L’Europe se meurt aujourd’hui des promesses ou annonces non suivies d’effets qui la décrédibilisent, ainsi que ses dirigeants.
Nous devons ensuite réformer les institutions de l’Union et leurs dysfonctionnements. Rien ne sert de laisser le président de la Commission prononcer un discours sur l’état de l’Union si celui-ci est inaudible par ses peuples, ce qui est un état de fait. Ce discours devrait être prononcé, à une heure de grande écoute, par le président en titre du Conseil de l’Union, en présence de tous les autres chefs d’Etat réunis en sommet pour approuver le plan de marche de l’Europe pour les 12 prochains mois. Il faut aussi simplifier l’ensemble des structures européennes en ramenant à 14 maximum le nombre de Commissaires européens, président inclus, et en supprimant la règle d’un commissaire par État. La même logique doit être appliquée dans l’ensemble de l’administration européenne.
Il est temps également d’appeler à la solidarité et au sentiment européen des citoyens et acteurs des pays de l’Union. 185 dirigeants de grandes entreprises américaines, appuyé par leurs autorités fédérales, viennent d’envoyer une lettre aux dirigeants des 28 États membres de l’Union européenne pour les appeler à combattre la décision de la Commission européenne contre Apple ! Nous devons nous-aussi mobiliser les peuples face à des partenaires internationaux et à d’autres puissances étrangères qui ne sont pas des enfants de choeur. Défendons nos intérêts communs plutôt que d’étaler et de flatter nos divisions, ce qui permettra aussi de débusquer les francs-tireurs et les adeptes du double jeu au sein même de l’Union.
Il faut enfin innover pour répondre aux besoins nouveaux et aux aspirations des peuples. Dans le respect des objectifs et compétences de l’Union définis par les chefs d’Etat et de gouvernement, nous devons développer de nouveaux projets, comme par exemple l’Europe de la santé ou un programme européen de mathématiques et de sciences, pour le plus grand service des peuples de l’Union, de leur savoir et de leur bien commun.
Le temps presse maintenant pour sauver l’Union. C’est aujourd’hui notre responsabilité commune si nous ne voulons pas revenir en arrière et renoncer à notre héritage collectif. L’heure est venue de sortir l’Union des mains des dirigeants-nains et de remettre l’Europe sur les rails, les rails d’une construction européenne ambitieuse, mais maîtrisée, moderne et efficace, mais respectueuse des peuples.