Ne laissons pas au Loto le monopole de l’ascenseur social !
http://www.lesechos.fr/opinions/points_vue/0203214781712-ne-laissons-pas-au-loto-le-monopole-de-l-ascenseur-social-640481.php
La création d’entreprise reste le meilleur moyen, malgré toutes les incertitudes et difficultés de l’entrepreneuriat, pour créer de la richesse partagée. Au-delà de l’incarnation médiatique de telle ou telle société par son principal dirigeant, le succès d’un projet entrepreneurial est toujours le fruit de l’association de compétences plurielles. Il faut la mobilisation de l’ensemble des salariés pour développer et réussir un projet ambitieux. Les dirigeants d’entreprise l’ont bien compris, comme en témoigne la volonté d’élargissement de l’actionnariat à des cercles managériaux de plus en plus large au sein des PME françaises. Le temps des dynasties industrielles familiales concentrant jalousement la richesse entre les mains de quelques « happy few » est loin…
Paradoxalement, il n’y a jamais eu, en France, aussi peu d’outils pour partager la richesse créée au bénéfice des
salariés. S’ils existent bien sur le papier – stock-options, bons de souscription d’actions (BSA), bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE), actions gratuites, plan épargne entreprise (PEE)… -, leur étouffement fiscal progressif par toutes les majorités récentes qui se sont succédé les rend inefficaces. Même combinés, ils sont quasi systématiquement privés d’intérêt et le plus souvent très coûteux pour l’entreprise.
Le cas des actions gratuites est édifiant. Le taux de la contribution patronale est ainsi passé de 10 % à l’origine à 14 % au 1 er janvier 2011, puis à 30 % pour les attributions effectuées à partir du 11 juillet 2012. Une multiplication par trois en moins de deux ans ! Comprenez ainsi qu’un dirigeant qui décide de donner pour 100.000euros d’actions à ses salariés devra immédiatement payer 30.000 euros d’impôt. Si certains de ces salariés quittent l’entreprise dans les quatre ans (et perdent ainsi le bénéfice des actions attribuées), ou si l’entreprise échoue – ce qui est loin d’être une hypothèse théorique dans la conjoncture actuelle – et que personne n’a bénéficié d’un quelconque avantage financier, ni fiscal, ces 30.000 euros d’impôts auront été versés en pure perte et sans aucune possibilité de remboursement. Et nous n’abordons même pas ici le sujet du traitement fiscal punitif qui s’appliquera ensuite aux bénéficiaires de cette attribution d’actions en cas de succès. Vous avez dit actions gratuites ? Voilà une affirmation bien mensongère ! Résultat : ce moyen de mobilisation et de partage de la création de richesse entrepreneuriale est totalement délaissé, sans qu’aucune alternative n’existe (l’usage des BSPCE étant limité aux seules jeunes entreprises).
Nous plaidons pour une remise à plat immédiate de l’ensemble des dispositifs actionnariaux en faveur des salariés afin de créer un nouveau système cohérent et efficace de mobilisation et de partage de la création de richesse. C’est la condition de la remise en marche de l’ascenseur social le plus efficace et le plus motivant. Laisser au Loto ce monopole n’est pas digne d’une nation ambitieuse !
François Vigne, président du R2F (Rassemblement républicain pour la France), est « managing partner » et fondateur de Sycomore Corporate Finance.
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