La privatisation d’Aéroports de Paris inquiète les Français. Le fait que 250 parlementaires de onze groupes aussi différents que les Républicains, l’UDI, le PS ou La France insoumise, aient réussi à se mettre d’accord en moins de 10 jours pour lancer une initiative commune de Référendum d’initiative partagée confirme l’ampleur du rejet par une vaste majorité de la population.

Les Français gardent un goût amer de la privatisation des autoroutes, ayant le sentiment d’avoir été floués et que ce sont d’abord les profits qui ont été privatisés. Les maladresses des sociétés d’autoroutes lors de la crise des Gilets jaunes en décembre 2018 n’ont fait que renforcer leurs doutes.

Les arguments utilisés par l’exécutif et ses opposants relèvent plus de l’idéologie que de la défense des intérêts économiques de la nation. La détention publique des grands aéroports américains, comme de celui de Singapour ou de Hongkong, démontre que la privatisation n’est pas le cas général, ni la seule structure actionnariale permettant d’assurer le succès durable d’un aéroport.

La justification budgétaire n’est pas plus convaincante. Rien ne peut excuser la cession des biens de la nation pour financer le fonctionnement de l’Etat, qui revient à dilapider l’héritage commun. La seule option légitime serait d’utiliser le produit de la cession de la participation de l’Etat dans ADP pour désendetter l’Etat. Il en résulterait une opération blanche pour les Français, la réduction de la dette publique se réalisant au prix d’un appauvrissement patrimonial national.

Mais l’argument du monopole brandi par les tenants du RIP est tout aussi spécieux, car Roissy et Orly sont déjà en concurrence avec les autres grands aéroports européens, comme avec la SNCF et les autres compagnies ferroviaires sur les courtes destinations.

La vraie bonne raison de privatiser ADP est de faire échapper cette grande société nationale à l’impéritie de la gestion publique, amplement démontrée par la situation d’EDF ou de la SNCF, l’affaire Renault et tous les autres naufrages que l’exécutif français a provoqué.

Pour sortir de l’impasse et assurer l’avenir d’ADP, rendons la société aux Français. La participation de l’Etat pourrait être utilement cédée à un nouveau fonds national spécifique, dont tous les citoyens français seraient actionnaires et dont l’objectif serait de financer les retraites. Pour garantir la bonne gestion de l’entreprise et éviter qu’elle ne tombe sous le contrôle effectif de ses dirigeants, serait mis en place un conseil d’administration composé à parité de spécialistes français de l’investissement et de citoyens de différentes classes d’âge, jeunes et retraités compris, tirés au sort, ainsi que de représentants des salariés.

Le nouveau fonds national serait destiné à recevoir d’autres actifs, en particulier d’infrastructure, afin d’assurer un complément de retraite à tous les Français, en complément de celles des régimes existants. L’opération permettrait ainsi à l’ensemble des citoyens d’acquérir une meilleure compréhension du fonctionnement de l’entreprise et de démarrer la constitution d’un fonds de pension français, au bénéfice de notre pays et de tout notre peuple.

L’heure est venue de sortir des vieux schémas et de faire preuve d’imagination et d’audace pour permettre à ADP, à notre pays et aux Français d’accéder à un avenir meilleur, dans le respect des intérêts de la nation et de ceux des générations futures.

lfm_2016