Chers Amis,
Il faut se garder de crier victoire trop tôt. Mais tout indique que nous verrons bientôt émerger la lumière au bout du tunnel du confinement. C’est pour cela que nous devons continuer à observer les consignes des autorités publiques. C’est aussi une raison supplémentaire pour préparer sans attendre la sortie de la crise sanitaire et le déconfinement. Nous le devons d’autant plus que les défis sont immenses.
Il faut être clair. Quand le président de la République a annoncé il y a près de trois semaines : l’Etat paiera, il savait lui-même que la France n’avait pas les moyens de la politique annoncée. Il n’y avait cependant pas d’autre choix pour assurer le ralliement des Français au confinement, seule solution disponible en l’absence de masques, de tests, de médicaments et de respirateurs en nombre suffisant. Ceux-ci arrivant peu à peu et le pic de l’épidémie approchant, il va devenir possible de remettre progressivement le pays au travail dans des conditions de sécurité sanitaire satisfaisantes.
C’est d’autant plus nécessaire que le coût des dispositifs de chômage partiel et de soutien à la trésorerie des entreprises est colossal. La situation budgétaire nationale ne nous permettra pas de tenir longtemps. Les marchés ne s’y trompent pas, qui font dès maintenant payer plus cher à la France ses nouvelles émissions obligataires. Dans ces conditions, chacun doit agir de façon responsable et citoyenne en ne recourant aux mécanismes de soutien exceptionnels que lorsqu’ils sont indispensables. Le devoir de tout entrepreneur et dirigeant est sinon d’assumer, à partir des ressources de son entreprise, les coûts de la sous-activité et de payer ses fournisseurs en temps et en heure pour leur éviter des problèmes de trésorerie.
C’est là le véritable patriotisme économique. Il est d’autant plus nécessaire que nous ne pourrons compter que sur nos propres forces. Les autorités européennes font leur possible. Mais pas plus que nous ne nous sommes véritablement portés au secours des Grecs ou des Italiens quand ils ont eu besoin de notre soutien, les Allemands ne viendront-ils financer le coût du sauvetage de notre économie. Aide-toi, le ciel t’aidera ! Au-delà des discours et des effets de manche sur les coronabonds, c’est à nous qu’il revient de préparer et de financer la reprise en procédant aux arbitrages indispensables.
Préparer et penser la sortie de la crise actuelle, c’est aussi anticiper le retour à une vie démocratique digne de ce nom et restaurer ses fondations. Comme l’a justement affirmé Mario Vargas Llosa il y a quelques jours, « le coronavirus ravit tous les ennemis de la liberté ». Notre démocratie et nos droits fondamentaux survivent actuellement en mode dégradé, selon la triste formule du moment. En décidant le 26 mars que l’exécutif pouvait déroger à la Constitution « compte tenu des circonstances particulières » de la crise du Covid-19, le Conseil constitutionnel a commis un crime contre l’Etat de droit, auquel il sera urgent de remédier.
La situation actuelle montre aussi que la majorité des citoyens sont prêts à accepter des concessions et des régressions majeures en matière de liberté et de droits fondamentaux, dès lors que leur santé et leur vie sont en jeu. Petit à petit, ce sont des droits immenses qui nous sont enlevés, des libertés jugées jusque-là essentielles qui nous sont retirées comme la liberté d’aller et de venir, de rendre visite à son prochain, de passer le baccalauréat ou des concours, de consommer, etc.
L’acceptation rapide et sans résistance de ces atteintes graves aux libertés essentielles par la grande majorité de la population, si elle peut être justifiée par les enjeux de santé publique, doit nous alerter. Il s’agit d’une faille majeure et d’un risque profond pour l’avenir de notre République, que pourront demain utiliser tous les ennemis de la liberté et les autres apprentis tyrans. Il nous revient d’en tirer les conclusions afin de bâtir les remparts nécessaires pour assurer l’avenir de notre démocratie et de la liberté.
Préparer la sortie de crise, c’est également effectuer le bilan réel de qui a fonctionné et de ce qui doit être amélioré dans notre système de santé. Il faut cesser de nous bercer d’illusions. Notre système de santé n’est plus le meilleur du monde, s’il ne l’a jamais été. Sa force est d’être ouvert à tous. Mais il souffre de l’appauvrissement de la France depuis 40 ans.
Nous avons vu, au cours des dernières semaines, les risques immenses pour la santé de la population française de la stratégie de sous-stockage de masques, tests, produits anesthésiants et autres médicaments, ainsi que du manque de lits d’hôpitaux en soins intensifs, pour lesquels nous n’occupons que la 19ème place de l’OCDE… La crise a aussi mis en lumière l’ensemble des dysfonctionnements consécutifs au cloisonnement entre secteur public et secteur privé, à l’enchevêtrement des compétences des différents acteurs publics et au système du mandarinat. Il est urgent d’en dresser tous les enseignements pour réaliser les investissements indispensables, constituer les stocks nécessaires et simplifier l’organisation.
Préparer la sortie de crise, c’est enfin nous attaquer vraiment aux problèmes auxquels sont confrontés les personnes en situation de handicap, les résidents des EPADs et, plus largement, les plus fragiles et les moins favorisés de notre société. Ils sont, une fois de plus, les premières victimes de la crise. Le confinement nous permet de mieux comprendre le quotidien de nos concitoyens à mobilité réduite. C’est une raison de plus pour repenser le système actuel et réaliser les investissements indispensables afin qu’ils puissent bénéficier des conditions de vie dignes qu’ils méritent.
Nous le voyons. Les défis sont gigantesques. Ils le sont d’autant plus que nous devrons les relever avec des moyens encore plus contraints, compte tenu du surplus de dette publique que les semaines de confinement vont provoquer. Mais ces défis sont à notre portée, comme le montrent différents exemples étrangers. Ce n’est qu’une question de vision, d’arbitrage, de travail et de volonté.
A nous de nous relever collectivement les manches pour sortir grandis de l’épreuve que nous endurons et d’offrir à nos enfants et petits-enfants l’avenir que nous voulons.
Renouvelant mon vibrant hommage et mes plus vifs remerciements à tous nos soignants, pharmaciens soldats, policiers, pompiers, agriculteurs, livreurs, caissiers, entrepreneurs ou salariés des industries essentielles et bénévoles, je vous souhaite à toutes et à tous un excellent week-end dans l’espérance du prochain déconfinement.
Amicalement
François Vigne
Président de la France en marche