Rien ne justifie de s’attaquer aujourd’hui aux statues des grands hommes et du passé, comme ce fut le cas de Colbert à Paris mercredi dernier. Ce n’est pas la première fois dans l’histoire. La Révolution s’accompagna de mêmes exactions que nous regrettons tous deux siècles plus tard au vu des dommages irrémédiables causés à notre patrimoine commun. Plus près de nous, les bolchéviques, les nazis, mais aussi les talibans afghans ou les partisans de Daech ont réalisé les mêmes destructions.

Qu’aucune de nos gloires passées ne soit parfaite, comme nous ne sommes pas parfaits, qui peut le nier. Il faut aussi reconnaître que nous avons collectivement progressé et heureusement renoncé à l’esclavage, au servage, aux massacres aux duels ou à la peine de mort. Mais aucun de nous ne peut dire comment il aurait agi à l’époque. C’est notre responsabilité collective d’assumer notre histoire, une histoire de France dont nous n’avons pas à rougir, malgré ses zones d’ombre. Les gommer serait la réécrire, ce qui reviendrait à la trahir et à ne pas donner aux générations futures les moyens de progresser à leur tour.

Par ailleurs, il est plus facile de s’attaquer aux statues, qui ne peuvent pas réagir, et de défendre des morts, qui n’ont plus besoin de nous, que de s’attaquer aux vrais problèmes de notre époque et d’apporter notre aide à ceux qui en ont besoin. En particulier, la bataille contre la pauvreté ou la vraie intégration des personnes en situation de handicap reste à mener dans notre pays. De même, nous devons nous battre pour que les droits des Rohingyas en Birmanie ou ceux des Ouïghours en Chine soient enfin respectés. Ce sont là les vrais combats que notre génération doit conduire et gagner, pas ceux du passé.

Il convient aussi, dans cette perspective, plutôt que de déboulonner ou badigeonner des statues, de faire le bilan de nos dirigeants les plus actuels ou les plus récents. Plutôt que de s’attaquer à la statue de Colbert, les partisans de ce mouvement, y compris Jean-Marc Ayrault, feraient mieux de demander que la Grande bibliothèque à Paris ou tous les autres monuments et rues qui portent le nom de François Mitterrand, soient débaptisés. Son passé de collaborateur ou son action comme ministre de l’Interieur sous la IVème République comportent des pages noires, dont il serait juste de tenir compte, puisque son action impacte encore la politique actuelle.

Nous devons surtout appliquer la même sévérité et la même exigence morale à nos gouvernants actuels. Il n’y a pas de sens à vouloir appliquer à des ministres d’il y a quatre siècles nos exigences  morales contemporaines et à se montrer très laxistes vis-à-vis de nos dirigeants actuels qui se révèlent tout sauf exemplaires, à commencer par Christophe Castane, Richard Ferrand et leurs homologues…

La France est une grande nation. Nous pouvons et devons être fiers de son histoire. Pour que les générations futures puissent l’être aussi et pour être à la hauteur de l’héritage que nous ont laissé nos parents, il nous revient d’agir, non pas en abattant des statues, mais en menant les combats de notre temps.

lfm_2016