La France attendait hier un discours de politique générale ambitieux à la hauteur des défis auxquels notre pays est confronté.
La volonté du président de la République de conserver le privilège de la vision et de la politique d’ensemble a contraint le Premier ministre à se contenter d’un catalogue général de mesures, souvent clientélistes, parfois pertinentes comme la revalorisation de l’allocation adulte handicapé et du minimum vieillesse ou la création de 15 000 places de prison, d’autres beaucoup plus contestables comme la limitation à quatre matières du baccalauréat.
Surtout, l’exécutif renouvelle l’erreur du choc fiscal qu’avait appliquée à la France en 2012 François Hollande et son équipe de conseillers, dont Emmanuel Macron, en annonçant une augmentation immédiate de la CSG et en différant à 2019 les promesses présidentielles de baisse de l’ISF ou de transformation du CICE en baisse des charges, à 2022 de la réduction du taux d’IS et à une date indéterminée de la suppression de la taxe d’habitation pour 80% des Français.
Le risque est grand que les promesses d’Emmanuel Macron ne soient jamais mises en œuvre. Comme pour le quinquennat précédent, le flou et l’immobilisme président, ce qui ne peut qu’inquiéter les Français. Ils le confirment en étant 41% à considérer que le Premier ministre n’a pas été convaincant contre seulement 27% à indiquer le contraire.
Certes, Edouard Philippe a eu raison d’affirmer hier qu’après avoir « anesthésié » les Français, il y a urgence à les « désintoxiquer » de la dépense publique. Mais il faudrait en tirer les conséquences et prendre les moyens d’une véritable remise en ordre des finances publiques. Le problème est que nous n’en prenons pas le chemin, puisque ni Emmanuel Macron lundi, ni Edouard Philippe n’ont annoncé, ou même esquissé, les bases d’une véritable refondation de l’Etat et de l’ensemble de l’appareil administratif. Nous en restons une fois encore au coup de rabot pratiqué depuis 35 ans au risque que les mêmes causes produisent les mêmes effets.
C’est pourtant maintenant qu’il faut agir pour redresser nos finances publiques, permettre à notre pays de repartir de l’avant et gagner la bataille du plein emploi. C’est ce que souhaitent les Français. C’est pour cela qu’ils ont donné à Emmanuel Macron la majorité parlementaire qu’il demandait.
Le chef de l’Etat préfère déjà travailler à préparer les conditions de sa réélection en gérant le calendrier des cadeaux fiscaux à concéder durant son quinquennat et en s’employant à diviser l’opposition pour ne laisser aucun espace entre lui et les extrêmes. C’est un jeu dangereux et cela l’empêche de se concentrer, ainsi que son gouvernement, sur les véritables enjeux : le redressement de la France et la refondation de l’Europe.
Après la double occasion manquée de l’allocution de Versailles et du discours de politique générale, l’intérêt de la France impose de redresser la barre !