Chers Amis,

Le déconfinement se déroule bien partout en France et en Europe. Il faut s’en réjouir, sans crier victoire trop tôt. Pour la remporter vraiment, une priorité s’impose: gagner la reprise. Elle doit constituer la préoccupation essentielle du gouvernement, ainsi que de tous les Français. Car seule un redémarrage dynamique nous permettra de financer la remise à niveau de notre système de santé, d’échapper au chômage de masse, d’éviter à la France un nouveau déclassement et de sortir par le haut de la crise actuelle.

Comme l’a affirmé Emmanuel Sales, l’économie ne va pas se réveiller toute seule ! Les chiffres communiqués mardi par la Commission européenne illustrent l’ampleur du défi. Le déficit de l’Etat est déjà programmé à 9,9%, la dette publique à 116,5% du PIB fin 2020. Ils devraient en fait être plus proches des 12% et 120% respectivement. Surtout, le chômage de masse menace. Les annonces de Renault concernant plusieurs fermetures de sites sont le signe avant-coureur des plans sociaux à venir. Plusieurs sont en préparation et devraient être annoncés à partir de juillet avec des effets redoutables sur l’emploi et sur la confiance des Français.

Le projet de relance franco-allemand révélé lundi est un pas dans la bonne direction, mais il ne nous aidera pas à régler nos problèmes. C’est l’Allemagne qui a imposé ses conditions. Le plan est en fait plus allemand que franco-allemand. Les 500 milliards prêtés devront être remboursés. Surtout, ils seront prioritairement affectés aux pays les moins favorisés de l’Union, ce qui signifie que la France prêtera plus qu’elle ne recevra. Enfin, l’Allemagne utilise habilement le jeu de rôles et compte bien sur les quatre États dits « frugaux », à savoir les Pays-Bas, l’Autriche, le Danemark et la Suède, pour raboter un peu plus le plan et le rendre encore plus allemand.

Dans cette perspective, organiser le second tour des élections municipales fin juin est une distraction inutile. Il est irresponsable de remettre les maires en campagne, alors que toute leur énergie devrait être focalisée sur la reprise complète des écoles et de l’ensemble de leurs services pour soutenir le redémarrage de l’économie. L’incertitude qui demeure sur la date exacte, avec le nécessaire feu vert du soi-disant Conseil scientifique d’ici trois semaines, va entretenir l’anxiété des Français, qui auraient au contraire besoin d’être rassurés et de bénéficier d’un horizon dégagé. C’est enfin un mauvais coup porté à la démocratie, car les conditions de la campagne conduiront à un simulacre d’élection. Comme pour le premier tour, l’exécutif se sera montré pusillanime et hésitant pour finalement mal décider. Une fois encore, ce sont les intérêts du pouvoir et des partis qui auront prévalu sur ceux de la République et des Français.

Les tergiversations, qui ont précédé la décision annoncée par Édouard Philippe hier midi et leur aboutissement, sont à l’image de l’action de l’exécutif depuis le début de la crise du coronavirus. C’est une gestion à la petite semaine, très séquentielle, sans vision d’ensemble, ni discours de vérité. C’est ce qui nous différencie des pays qui ont bien géré la crise sanitaire, de l’Allemagne à l’Autriche en passant par le Danemark et la Corée du Sud. Le naufrage de l’affaire des masques est emblématique. Il faut avoir vécu depuis deux mois sur la planète Mars ou être dans un déni complet pour affirmer, comme Emmanuel Macron lundi, que notre pays n’a jamais été en rupture de masques… La défiance des Français à l’égard de leurs gouvernants n’a pas d’autre cause. S’ils portent le jugement le plus sévère de tous les peuples de l’Union sur la gestion de la crise par l’exécutif, c’est parce que vision d’ensemble et discours de vérité ont manqué.

Il y a urgence à les retrouver pour sortir par le haut de la crise actuelle. Les deux mois et demi que nous venons de traverser ont été traumatisants. Nous avons vécu sous la contrainte. Beaucoup de nos libertés fondamentales ont été malmenées, souvent de façon abusive comme le prouvent les décisions du Conseil d’Etat de lundi dernier sur la reprise des cultes ou sur l’usage des drones par la police à Paris. De nombreux Français ont du mal à reprendre le chemin du travail et à voir dans leur prochain, le passant croisé dans la rue, le collègue au sein de l’entreprise, le client ou l’élève, autre chose qu’un danger potentiel. La peur par rapport à un risque mal cerné, l’exposition à un flot continu d’informations anxiogènes et contradictoires, ainsi que la confrontation à des situations inédites ont bouleversé les repères qui permettaient à chacun d’organiser son action et de vivre en société.

Donner un sens et une perspective est la clef de voûte de la reprise. Nous pouvons aller plus loin et transformer le moment exceptionnel que nous vivons en temps de progrès pour la France, pour l’Europe et pour tout notre peuple. Il ne s’agit pas de ressortir les vieilles recettes du passé, comme le plan Marshall datant de 1947, ou les mauvaises idées comme l’ISF, dont François Mitterrand lui-même reconnaissait qu’il était un impôt imbécile. Rétabli dans son ancienne version, il rapporterait à la France trois milliards d’euros supplémentaires. Il faudrait donc plus de 133 ans d’ISF pour régler la facture d’au moins 400 milliards des huit semaines de confinement… Le sujet n’est donc vraiment pas là. Le véritable enjeu est de réfléchir tous ensemble, en nation, à ce que nous avons apprécié pendant cette période, ce qui au contraire nous a déplu ou oppressés, ce dont nous sommes fiers et ce que nous voulons garder pour avancer. Cet exercice est à notre portée. C’est maintenant à nos gouvernants de l’organiser.

Le temps est compté. L’erreur n’est pas permise. Nous bénéficions d’un temps court pour permettre une vive reprise et placer notre pays sur le chemin du relèvement plutôt que celui du déclassement. Notre choix est là. Il exigera des efforts. Nous en serons récompensés. Surtout, nous serons à la hauteur de l’histoire de notre nation, ainsi que de l’héritage que nous ont transmis les générations précédentes, et en mesure d’offrir un monde meilleur à nos enfants et petits-enfants. Ensemble, construisons la France que nous voulons

Bon week-end à tous

Amicalement

François Vigne

Président de la France en marche

lfm_2016